Place Philippe-de-Broca, allée Chantal Akerman… Ces cinéastes que Paris a immortalisés
Le saviez-vous ?
Mise à jour le 11/05/2023
Sommaire
Paris, capitale du cinéma ! Une plaque, une dénomination de voie… la ville rend hommage aux grands réalisateur.trices et scénaristes entrés dans l'histoire du 7e art.
Paris compte encore 420 écrans et une trentaine de cinémas indépendants. Paris accueille aussi près de 1 000 tournages chaque année et mène une politique de soutien au cinéma. C’était donc naturel qu’elle rende hommage à de grands noms du cinéma comme Philippe de Broca, Chantal Akerman ou Jean-Claude Carrière… Le Conseil de Paris vote les dénominations des rues et squares et l’apposition des plaques. Idéalement, le lieu baptisé ou rebaptisé a un rapport concret avec la personnalité proposée et son parcours ou sa biographie.
Après notre balade dans les rues et voies qui ont pris le nom d’acteurs et d’actrices, voici un troisième épisode dédié aux réalisateurs et aux réalisatrices.
Un square pour Jean-Claude Carrière
Auteur d’innombrables
romans, essais, pièces de théâtre, paroles de chansons… Jean-Claude Carrière
(1931-2021) était attaché au 9e arrondissement de Paris où il a passé la
majeure partie de sa vie et où il a écrit ses plus grandes œuvres. À sa
mort, il habitait au 5, rue Victor Massé, dans une ancienne maison close –
connue jusqu’en 1830 sous le nom de Cercle Massé - et qui avait également été un
des anciens ateliers de Toulouse-Lautrec. Les écrivains Stefan Zweig et Alphonse Allais y ont vécu, eux aussi.
Scénariste internationalement reconnu, Jean-Claude Carrière a travaillé aux côtés des cinéastes Luis Buñuel,
Jacques Deray ou Milos Forman pour les films Belle de Jour, Borsalino
et Valmont. En 1983, il est
récompensé du César du meilleur scénario pour Le Retour de Martin Guerre et il obtient un Oscar d’honneur en
2015. Il a présidé de 1986 à 1996 la Fémis, l’École nationale supérieure des métiers de l’image et du son, située dans le 18e.
C’est pour rendre hommage
à cette riche carrière que le Conseil
de Paris a attribué au square d’Anvers (9e) le nom de « Square
d’Anvers-Jean-Claude Carrière » en 2021, dérogeant ainsi à la règle qui prévoit que le nom d’une personnalité ne peut être
attribué à une voie publique de Paris que cinq ans, au plus tôt, après son décès.
Une place pour Philippe de Broca
En hommage au réalisateur aux trente
longs-métrages – la plupart devenus de grands succès du cinéma populaire -, le Conseil
de Paris a nommé place Philippe-de-Broca, une place du 12e arrondissement située à l’intersection du boulevard de la Bastille, de la place
Mazas, du quai de la Rapée et du pont Morland. Philippe de Broca (1933-2004) était
un enfant du quartier. Il poursuit des études de
photographie et de cinématographie dans le 15e arrondissement et débute
au service presse de l’armée française pendant la guerre d’Algérie. Formé à l’école de la Nouvelle Vague, il prendra pourtant une autre voie, celle des films
d’aventure : la rencontre avec Jean-Paul Belmondo va donner naissance à
une collaboration qui débute avec Cartouche (1962) puis L’Homme
de Rio l’année suivante, suivi des Tribulations d’un Chinois en
Chine (1965), du Magnifique (1973) ou encore de L’Incorrigible (1975).
Paris fait partie du paysage de nombre de ses films, et
surtout Tendre Poulet (1978), où la commissaire
de police interprétée par Annie Girardot sillonne le Marais à solex. Cap
ensuite sur La Sorbonne, la salle Wagram ou encore le Palais de Chaillot, sans
oublier la Préfecture de police, quai des Orfèvres.
Une plaque pour Dennis Berry
C’est à Hollywood que né Dennis Berry, en août
1944. Il arrive en France à l’âge de sept ans, à la suite de l’exil de son père,
le réalisateur John Berry, dénoncé comme communiste à l’époque du maccarthysme.
Il devient comédien à l’âge de 13 ans : il
parle anglais et le Centre Américain de Paris cherche un ado bilingue. En 1972, Dennis Berry épouse l’actrice Jean
Seberg. Elle joue dans le premier film qu’il réalise
en 1975, Le Grand délire. Après leur séparation, c’est une autre comédienne qu’il
épouse, Anna Karina, qui interprètera le premier rôle de Last song, un film qui se déroule dans le milieu de la musique à Paris. Le réalisateur se
tourne ensuite vers la télévision en mettant en scène de nombreux épisodes de
la série télévisée Highlander.
Il meurt le 12 juin 2021 dans
le 14e arrondissement à
l’âge de 76 ans. Il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise aux
côtés d’Anna Karina. Une plaque honore le couple à l’adresse où ils ont vécu au 156, boulevard Saint-Germain à Paris 6e.
Un jardin pour Carole Roussopoulos
Suisse de naissance, mais parisienne de cœur, Carole Roussopoulos (1945-2009)
a tourné près de 120 documentaires, donnant la parole à tous celles et ceux que la
société ne veut pas voir et entendre : ouvrières
de LIP, gays et lesbiennes, personnes immigrées, prostituées, mères espagnoles
au temps du franquisme…. Elle est la première femme et le deuxième cinéaste (après
Jean-Luc Godard) à avoir acquis en France une caméra Portapak qui pouvait être
portée et manipulée par une seule personne. C’est pour témoigner des échanges entre Jean Genet et
Angela Davis qu’elle utilise cette caméra pour la première fois.
Et pour donner voix
à tous les combats, elle crée le premier collectif de vidéo militante, Video Out, en 1971, année où elle filme la première marche de ce qui
ne s’appelait pas encore les Fiertés LGBT à Paris. En 1974, avec Delphine
Seyrig et Iona Wieder, elle fonde Les Insoumuses, association de création vidéo
militante, et réalise Maso et Miso vont
en bateau et SCUM Manifesto, deux
pamphlets inventifs et irrévérencieux.
La réalisatrice a aussi fondé en 1982 le Centre audiovisuel
Simone-de-Beauvoir qui archive et produit toujours des documents consacrés aux
femmes. De 1986 à 1994, elle anime et dirige le lieu culturel L’Entrepôt
(14e).
De nombreux hommages lui ont été rendus dans les
salles, les festivals ou les cinémathèques, parmi lesquels celui de la
Cinémathèque française en 2007. Carole Roussopoulos a été nommée Chevalière de
la Légion d’honneur en 2004. Paris a joint sa voix à ces hommages en associant,
en 2022, son nom au jardin du 125, rue Vercingétorix (14e),
désormais dénommé Jardin du Moulin de la Vierge – Carole-Roussopoulos.
Une allée pour Chantal Akerman
C’est en 2020 qu’a été
dénommé allée Chantal-Akerman le terre-plein central de la rue Sorbier (20e), nouveau
jardin de la Petite Ceinture. Un lieu situé non loin de celui où vivait la cinéaste
(1950-2015), rue Henri Chevreau, et dans l’arrondissement où elle repose
désormais, au cimetière du Père-Lachaise.
De nationalité belge, Chantal Akerman a vécu à New York avant d’arriver à Paris dans les années 1970. Elle a été l’une des
figures du cinéma moderne, influençant de nombreux réalisateurs français et
étrangers. Issue d’une famille juive polonaise, elle a traité particulièrement dans ses
films de sa relation avec le judaïsme, mais aussi des relations mère-fille et de
l’identité féminine.
Parmi les films de sa longue carrière, on trouve Les Rendez-vous d’Anna avec Aurore Clément, road movie autobiographique en
train de l’Allemagne vers Paris, la comédie musicale Golden eighties, Un divan à New York avec William Hurt et Juliette Binoche ou encore
La Captive avec Sylvie Testud. En 1984, elle est l’une des six cinéastes a avoir participé
au film à sketchs Paris vu par… 20 ans
après. Elle y montre dans sa vignette deux fugueuses de 17 ans débarquant à Paris, car elles
« étouffaient à Bruxelles ».
Mais c’est le film Jeanne
Dielman, 23, quai du commerce, 1080 Bruxelles qui est considéré comme son chef-d’œuvre.
C’est une description méticuleuse, en illusion de temps réel, de l’aliénation de
la femme, avec Delphine Seyrig. Le 1er décembre 2022, 1 639 critiques
placent ce film au sommet du prestigieux palmarès établi par Sight and Sound et
le British Film Institute.
Un jardin pour Marie-France Pisier
Marie-France
Pisier (1944-2011) a
débuté sa carrière d’actrice en 1961, repérée par François Truffaut alors
qu’elle joue dans une troupe de théâtre amateur. Elle tournera à ses
côtés Antoine et Colette et L’Amour en fuite.
Après des films de genre de Robert Hossein, elle devient une égérie du cinéma
d’auteur. Elle obtiendra deux fois le César du meilleur second rôle et celui de
la meilleure actrice, en 1976, pour sa prestation dans Cousin, cousine de
Jean-Charles Tacchella. Marie-France Pisier prend aussi part à plusieurs succès
populaires – elle est notamment la partenaire de Belmondo dans L’As
des as en 1982. Intellectuelle engagée, elle est l’une des
signataires, en 1971, du Manifeste des 343, appelant à la légalisation de
l’avortement en France. Elle embrasse, en 2006, l’un de ses derniers rôles dans
le film Dans Paris de Christophe Honoré.
On la connait peut-être un peu moins pour ses deux passages derrière la
caméra. Elle s’inspire de son séjour
en Nouvelle-Calédonie pour son roman Le Bal du gouverneur,
paru en 1984. C’est son propre roman qu’elle met en scène en 1990. En 2002,
elle écrit, réalise et interprète son deuxième film, Comme un avion, qui aborde le suicide de ses parents, à deux ans
d’intervalle, quinze ans plus tôt.
Les jardins de l’avenue Foch sont un espace vert qui longe sur ses
deux côtés et sur toute sa longueur l’avenue Foch. En 2015 et 2016, certaines
portions de ces pelouses ont été baptisées, l’une d’elles porte le nom de
Marie-France Pisier.
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